Avant 1968, les sous-marins du type DAPHNE paraissaient
réussis et nos services techniques en étaient fiers.
On allait même jusqu'à dire, peut être imprudemment,
qu'ils étaient parfaitement sûrs en plongée.
Lorsque
Ia MINERVE disparut cette confiance ne fut pas ébranlée.
On voulut croire à un abordage en plongée avec un mystérieux
sous-marin, peut-être soviétique, ou encore à
une faute de l'équipage. Cette sorte de blocage intellectuel
fit qu'on n'étudia pas sérieusement l'hypothèse
d'une défaillance du matériel ou celle d'une erreur
de conception, et qu'on ne prit par conséquent aucune mesure
préventive ni curative.
Deux
ans après, le 4 mars 1970, l'EURYDICE disparaissait à
son tour, corps et biens, prêt de St Tropez, au large du cap
Camarat, ( une quinzaine de kilomètres ). Cette fois, ce fut
comme un coup de tonnerre qui débloqua les esprits les plus
verrouillés dans leurs certitudes.
Le
sous-marin avait appareillé de St Tropez à 5 heures
du matin pour une série d'exercices qui devait se poursuivre
3 heures durant dans une zone à l'est des iles d'Hyères,
entre 7 et 10H. Il était commandé depuis six mois par
le lieutenant de vaisseau Bernard Truchis de Lays, ancien commandant
en second de la Minerve ; un officier pakistanais, le lieutenant Jhanil
Khan, appelé à servir à bord d'un sous-marin
de même type, accompagnait la mission. Le submersible était
en liaison constante avec un Breguet-Atlantique de la base de Nîmes-Garon.
La mer et la visibilité étaient bonnes. A 4 milles nautique
du port le sous-marin se mit en immersion périscopique. A 7H13,
le Bréguet perd le contact radio, radar et visuel avec le sous-marin.
Le dernier message signalait que tout allait bien à bord.
Les
recherches sont entreprises sous la conduite de l'escorteur d'escadre
"Surcouf", commandé par le capitaine de vaisseau
Quentin sous les ordres de l'amiral Guillon, un hélicoptère,
deux "Bréguet", des escorteurs ("le Duperrey","le
Picard", "le Vendéen", "l'Alerte"
) , six dragueurs, des batiments d'appui ( "Arago", "jean
Charcot") et sous-marins ( "Daphnée" et "Doris"
) assistés de quatres dragueurs italiens. La marine américaine
faisait parvenir le batiment spécialisé "Skylark"
basé à Rota en Espagne.
A
13 heures, la gabare "Fourmie" recueille des échantillons
de mazout et divers débris : morceaux de plastic, fiches d'immatriculation
d'appareils portant le nom du sous-marin, matériaux de contreplaqué,
cartes mécanographiques d'un matériel de rechange délivré
à l'Eurydice. L'analyse du gas-oil a permis d'établir
qu'il s'agissait d'un carburant de type sous-marin avec forte teneur
en souffre. L'analyse des bandes des séismographes des stations
d'écoute du laboratoire de géophysique font apparaitre
les traces d'une explosion en mer à 7H28.
La
cérémonie en mémoire des disparus se déroula
en présence du premier ministre Jacques Chaban-Delmas et Michel
Debré, ministre de la Défense. Le président de
la république Georges Pompidou dans un message transmis au
ministre déclara s'incliner avec respect devant les marins
victimes de leur devoir.